23 novembre 2007

Le Premier Cri

Alors voilà, je l'ai enfin vu, ce "Premier cri"...







Ce film est ....... y'a-t-il un mot qui peut résumer les émotions ressenties en le voyant? Magnifique, absolument magnifique.

On y voit l'accouchement sous toutes ses formes. Le réalisateur nous balade de la forêt amazonienne, où la future mère se fait peindre le corps dès les prémices du travail, à la plus grande maternité du monde (au Viêtnam) où le mot "inhumain" prend tout son sens, en passant par le Canada et une communauté hippie où une femme, dans toute la beauté de la force de sa féminité, décide d'accoucher sans assistance. Ou encore, on y voit une césarienne en Sibérie, où on se prend en pleine face l'infinie solitude d'une jeune femme, à qui on voudrait pouvoir ne serait-ce que tenir la main et faire un sourire réconfortant...

Avec ce film, on réalise à quel point nous sommes toutes pareilles et égales. Française ou masaï, japonaise ou indienne, nous sommes simplement Femmes, le jour où notre bébé décide de venir au monde. Nous partageons les mêmes douleurs de l'enfantement et la joie unique de découvrir notre petit une fois né.

Mais il y a bien un aspect dans lequel l'écart se creuse, parfois bien cruellement, c'est dans les rites culturels et sociaux, qui dictent la manière dont va être entourée la mère, le lieu où va avoir lieu la naissance et comment se fait l'accueil du bébé. Et alors là, hélas, nous ne sommes plus égales. Du tout.

Soit la naissance est reconnue comme un phénomène physiologique et naturel, et la mère comme ayant les compétences et les ressources pour faire naître son enfant sans qu'on intervienne, soit elle est infantilisée, considérée comme inapte, et bafouée dans son intégrité et dans son intimité. Et ce n'est pas en Occident qu'on est le plus gâtée!

J'ai été outrée (mais finalement, peu étonnée) de voir la réaction du magazine Elle. Un coup de gueule, rien de moins!

En France, comme ici en Suisse romande, les sage-femmes sont tellement engluées dans les protocoles hospitaliers qu'elles en perdent de vue l'essentiel. Alors bien sûr, quand on est imprégné d'images d'accouchement sur le dos et avec péri, ça remue sacrément les croyances de voir une femme accoucher au milieu des dauphins (qui au passage font d'excellentes doulas) avec une sage-femme dont le regard est empli d'une vraie et profonde sagesse. Mais ça fait trop peur à la journaliste de Elle, il faut vite se rassurer en traitant cette sage-femme "d'écolo"...

Ensuite, cette même journaliste, s'offusque du "déni" de la réalité des chiffres de la mortalité néonatale dans les pays en développement. Oui, dans le monde, des femmes et des bébés meurent lors de la naissance. Mais remettre en cause l'accouchement physiologique n'a pas de sens. C'est un dangereux amalgamme. Ce n'est pas parce que beaucoup de femmes meurent dans tel pays pauvre qu'il faut considérer l'AAD dans nos pays comme inconscient!

Oui, on voit un bébé mort-né au milieu du désert. Comme si cela n'arrivait jamais dans des hôpitaux pourtant à la pointe de la technologie...

Ah les chiffres! Pourquoi les Pays-Bas, avec leur 30% d'accouchements à domicile, ont les meilleurs résultats en mortalité infantile et maternelle? J'ai pu remarquer, lors de conversations avec des gens qui ne jurent que par les hôpitaux et leur prétendue sécurité, que cette information n'est pas intégrable. Ça remettrait tout en cause, et c'est trop difficile ou douloureux. Gardons prudemment la tête dans le sable... Ou alors, il y a des tentatives d'explications: les néerlandaises et nous ne serions pas pareilles, en fait. Oui, ce doit être ça, sûrement.

A la fin de l'article, la journaliste juge cette canadienne qui décide d'accoucher sans assistance. C'est grave, dit-elle. Même si je ne le ferais pas, je respecte la philosophie de cette femme. Elle explique tranquillement qu'elle est consciente du risque, mais que la mort fait partie du processus de la vie et qu'elle l'accepte. Tant de sérénité, moi j'admire.

La journaliste conclut son article par une question: "Quel message le réalisateur veut-il nous faire passer?"

Ma réponse: que la naissance est un acte universel, que toutes les femmes du monde partagent. Que la nature est belle est bien faite, même si parfois la mort s'en mêle. Et surtout, que les femmes ont en elles cette force incroyable, cette puissance infinie qui leur permet de mettre au monde ce bébé qu'elles ont fabriqué et porté 9 mois durant. Pour moi le message est qu'il faut reprendre conscience de ça, et retrouver une confiance depuis longtemps perdue, et là je parle pour l'occident. Confiance, oui, et aussi, respect.

Voilà mon coup de gueule contre le coup de gueule.

Alors M. Gilles de Maistre, je vous dis merci, et bravo. Mille bravos pour ce sublime documentaire, à 10'000 lieues de la médiocre "Odyssée de la vie" de votre confrère.

MERCI!

6 commentaires:

Shalima a dit…

Je suis contente de lire ton avis sur le film, ne l'ayant pas vu et étant fort surprise de la réaction de la journaliste de ELLE. Mais en y réfléchissant 2 secondes, je ne suis pas étonnée de la virulence de leur réaction, tout comme celle de la journaliste de Libé lors de la 1ère grande tétée l'année dernière. Ya du boulot (ça tombe bien, tu es là pour ça ^_^)

Sandrine a dit…

Comme tu dis, y'a du boulot...

J'ai presque envie d'écrire au courrier des lectrices de Elle, mais..... à quoi bon? Je l'avais déjà fait une fois concernant l'AAD, sans suite évidemment.

Cette dame a le droit de penser ce qu'elle veut, mais je trouve honteux qu'elle vienne polluer le magazine avec des peurs qui lui appartiennent.

Maria a dit…

J'ai très envie de le voir ce film et plus encore maintenant, vu ta description et aussi suite à ce que j'ai vu sur le site du film! c'est tellement vrai!
C'est honteux que des journalistes se permetent de juger de cette façon un si beau travail d'une telle verité!

Frida de Bergerac a dit…

La bande annonce est magnifique. je crève d'envie de voir ce film qui j'en suis certaine va beaucoup m'émouvoir. Moi non plus je ne comprends pas la réaction de cette journaliste. Merci pour ce moment d'émotion.

MadameNi a dit…

Je l'ai vu!!!
Pas plus tard que vendredi, alors que je n'avais pas vu ton article.

J'ai tout simplement a-do-ré. J'ai pleuré, j'ai ri, j'ai été révoltée, touchée. C'était si beau!!!

D'ailleurs, je suis rentrée à la maison en annonçant que je voulais partir accoucher au Mexique!!!^_^

J'ai d'abord été gênée par la douce folie de cette canadienne, puis j'ai aimé sa façon d'accepter la nature, son corps, ...

J'ai tellement aimé cette indienne d'Amazonie, si belle. Cette maison de naissance japonaise. Cette femme masaï heureuse d'avoir donné naissance à une petite fille. Cette indienne, souriante, malgré le fait qu'elle ait eu encore une petite fille...

Bref, je les ai aimées toutes ces femmes. J'ai accouché avec chacune (au point que j'ai eu plein de contractions...)

J'ai même trouvé de la tendresse chez ce médecin accoucheur vietnamien... là où tout semble inhumain.

Mais surtout, à aucun moment je n'ai vu de jugement, ni de prise de position. Ni de pour, ni de contre, juste des témoignages. Pas de prosélytisme, pas d'encouragement à choisir l'une ou l'autre voie. Non, rien de criticable à mon avis.

Et si on lit bien le site du film, il est très justement écrit que la mortalité infantile ou maternelle lors de l'accouchement est dû à un manque d'encadrement par des personnes qualifiées. Donc non, le réalisateur n'est pas inconscient, il a juste voulu montrer toute la beauté de l'enfantement.

Et ça, c'est très réussi.

Sandrine a dit…

Ah je suis contente que tu l'aies vu, et aimé (malgré les contractions... ;) )

J'ai décidé que chacun de mes futurs accompagnements débuteront par un visonnage de ce film, car je trouve que c'est une formidable base de réfexion et de discussion.